Hier soir était diffusé sur France 3
un téléfim policier réalisé par Eric DURET, intitulé « Un
mensonge oublié ». Peu de jours avant son mariage, une jeune
métisse est découverte noyée. Tout laisse à penser que le décès
est accidentel. Son futur époux n'y croit pas, Tel est le début de
l'intrigue, et le film se laisse regarder avec plaisir.
Mais son intérêt réside surtout
dans le fait qu'il évoque l'affaire dite des « enfants de la
Creuse ».
Entre 1963 et 1982, afin de faire face
à la fois à la sur-natalité sur l'île de la Réunion et le
dépeuplement de certaines zones rurales en métropole, plus de 2 000
enfants, âgés de 5 à 15 ans essentiellement, relevant de l'aide
sociale à l'enfance, ont été arrachés à leurs racines, à leur
milieu, et amenés en France, sur une idée du député de la Réunion
Miche DEBRE,
Certains ont été recueillis par de
familles honnêtes alors que d'autres ont vécu en situation de
quasi-esclavage.
Ce n'est que en 2014 que l'Etat
français a reconnu sa responsabilité dans ce scandale d'Etat. Une
résolution de l'Assemblée nationale en date du 18 février 2014 a
demandé la création d'une commission d'étude.
L’Assemblée
nationale,
Vu
l’article 34-1 de la Constitution,
Vu
l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,
Considérant
que l’État se doit d’assurer à chacun, dans le respect de la
vie privée des individus, l’accès à la mémoire ;
Considérant
que les enfants, tout particulièrement, doivent se voir garantir ce
droit pour pouvoir se constituer en tant qu’adultes ;
Considérant
que dans le cas du placement des enfants réunionnais en métropole
entre 1963 et 1982 ce droit a été insuffisamment protégé ;
1. Demande
à ce que la connaissance historique de cette affaire soit
approfondie et diffusée ;
2. Considère
que l’État a manqué à sa responsabilité morale envers ces
pupilles ;
3. Demande
à ce que tout soit mis en œuvre pour permettre aux ex-pupilles
de reconstituer leur histoire personnelle.
Délibéré
en séance publique, à Paris, le 18 février 2014.
Cette commission a notamment écrit :
« Certains
fermiers ont eu tendance à demander beaucoup, sans doute trop, à
des mineurs venus d’ailleurs, qui sont ainsi victimes d’abus
et/ou de mauvais traitements »
« ces
jeunes sont mal armés pour faire face aux souffrances causées par
leur immersion dans la société de la France hexagonale ».
« Le
directeur du service de la population et le préfet de La Réunion
peuvent être satisfaits de la réponse jacobine dont ils ont
accouché sur le papier pour parer au plus pressé, mais ce qu’ils
ont imaginé ne tient aucun compte du fait qu’il s’agit de
Réunionnais, avec leur identité propre, qui portent le poids d’une
histoire et d’une culture particulières et qui souffrent du
mal-être du déracinement »
« Il
semble aujourd’hui évident de dénoncer comme une hérésie
l’implantation d’enfants de La Réunion à plus de
9 000 kilomètres de chez eux, dans des campagnes de
l’Hexagone frappées par l’exode rural, ajoutent-ils. A
l’époque, le contexte fait que la très grande majorité des
esprits n’est choquée ni à La Réunion ni dans l’Hexagone. La
dénonciation de la transplantation n’a finalement pris corps
qu’avec la prise en compte des apports de la pédopsychiatrie. »
Jean
Jacques MARTIAL, lui-même arraché à la Réunion et implanté en
France a dit, quant à lui :
« Nous
avons tous été des cobayes. Si certains ont pu s’intégrer,
beaucoup ont fini dans des centres psychiatriques, quelques-uns se
sont suicidés. Tous ont été atteints par cet enlèvement »
,
Pour tous ces enfants et leurs
familles, pour toutes les souffrances endurées, n'oublions pas ce
mensonge !
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